De passage en Nouvelle–Calédonie, Henry Pasteur nous a livré ce témoignage sur son père, missionnaire à Do-Néva, puis à Rô, de 1919 à 1925.
«Mon père n’était pas théologien. Il avait commencé à travailler à l’âge de quatorze ans. Il était artisan-missionnaire. Il fut d’abord artisan-missionnaire au Gabon à l’époque du docteur Schweitzer, mais une double pleurésie l’obligea à rentrer, en 1916, pour se faire soigner en Suisse où il resta hospitalisé deux ans.
Marié en 1919, il s’embarque la même année pour la Nouvelle-Calédonie afin d’assurer, à Do-Néva, l’intérim de Maurice Leenhardt qui était resté seul et n’avait pu de ce fait rentrer en France depuis 1910. Dans les missions protestantes, lorsqu’il n’y avait pas, ou trop peu, de missionnaires attitrés pour effectuer toutes les tâches, on faisait appel aux artisans missionnaires.
Il reste à Do-Néva jusqu’en décembre 1923, puis il est envoyé à Rô (Maré) qui manquait de missionnaire depuis longtemps et remet en marche l’imprimerie qui avait servi à imprimer les évangiles traduits en langues vernaculaires. Aidé d’infirmières missionnaires, il s’occupe également des lépreux.
A son retour en Suisse en 1924, il tente de créer “L’Œuvre de Maré” en faveur des lépreux, mais sans résultat. Il revient s’installer à Maré en 1937 pour y travailler à son compte, tandis que son épouse prend en charge durant quelque temps l’Institut Jeanne-d’Albret. A l’époque, nous, les enfants, étions très contents de revenir vivre en Nouvelle-Calédonie, partageant notre temps entre les études au collège Lapérouse (aujourd’hui lycée) et les grandes vacances à Maré.
Pour ma part, je suis né en 1924, à Maré. Mes deux sœurs, elles, sont nées à Do-Néva. Je suis parti début 1945 à l’école de Saint-Cyr de Coëtquidan. Démobilisé en 1946, j’ai commencé des études de théologie dans l’intention de devenir missionnaire à mon tour, mais en chemin je me suis intéressé à la philosophie et j’ai continué dans cette voie. Nommé professeur au lycée Lapérouse de 1957 à 1960, j’ai ensuite collaboré à différents programmes de formation de l’UNESCO. J’ai conservé de la famille en Nouvelle-Calédonie, du côté de ma sœur et de ses enfants, et j’y suis revenu à plusieurs reprises pour de courts séjours.
Mon père est mort à Nouméa en 1951 et il y est enterré. Il m’a laissé quelques aquarelles de Do-Néva et de Maré ainsi que des lettres et rapports retrouvés à la Société des Missions évangéliques de paris (SMEP).
Ma sœur aînée, Émeline, est restée en Nouvelle-Calédonie où elle a participé activement à la vie de la paroisse protestante de Nouméa.»
Propos recueillis par Gérard del Rio. Article paru dans la revue culturelle kanak Mwà Véé, N° 38, Oct-Nov-Déc 2002, éditée par l’Agence de développement de la culture kanak (ADCK).
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